QUI, DE L'OR OU DU DOLLAR, SERA LE PLUS FORT ?

STRATEGIE ET THEMATIQUES
Lundi 15 Avril 2024
La baisse des taux semble désormais acquise et programmée de manière séquentielle
Les investisseurs chercheront à arbitrer une partie de leur cash pour des obligations
Ils pourraient également décider de vendre une partie de leur or, vu sa récente envolée
Dans ce scénario, le billet vert est susceptible d'être mis sous pression

GRAPHIQUE DE LA SEMAINE : "Et si l'écart se refermait partiellement ?"

ANALYSE DES MARCHÉS FINANCIERS


Les investisseurs anticipent quatre baisses de taux d'ici 12 mois aux États-Unis. Les gouverneurs de la Fed ayant récemment réitéré leur orientation en matière de politique monétaire (forward guidance), les acteurs de marché s'attendent à une première baisse des taux en juin ou en septembre, de 5.50% à 5.25%, suivie de trois autres pour atteindre 4.50% en mars 2025 (cf. Fig. 2). Ce niveau de rendement correspond à celui des obligations dont l'échéance est actuellement comprise entre 5 et 10 ans. Malgré ces anticipations de baisses des taux, les investisseurs continuent de plébisciter les dépôts fiduciaires à très court terme. Preuve s'il en faut, les flux à destination des fonds monétaires viennent d'atteindre des montants records (cf. Fig. 3).

Il existe deux inconvénients à conserver des obligations à duration courte dans les portefeuilles :

  • Dans 6, 12 ou 18 mois, lorsqu'ils devront rouler leurs positions, les investisseurs ne pourront pas obtenir d'aussi bonnes conditions de placement qu'aujourd'hui. Les taux chutant, les rendements futurs (4.50%) seront nettement plus faibles que les rendements actuels (de 5.50%).
  • Historiquement, lorsque la courbe des taux se repentifie, elle le fait en deux phases distinctes. Dans un premier temps, la partie courte chute (bull steepening) et la courbe a tendance à se translater vers le bas. Ainsi, grâce aux effets positifs de la duration, les obligations longues délivrent de meilleures performances. Ce n'est que dans un deuxième temps que les taux longs augmentent, pour achever le processus de pentification (bear steepening), et que le prix des obligations longues en pâtit.


Au vu de ces deux coûts d'opportunité, les investisseurs finiront par allonger la duration de leurs portefeuilles obligataires.


Paradoxalement, les investisseurs institutionnels en quête de rendements sont en train d'accumuler un actif qui ne délivre aucun coupon : l'or. Le métal précieux vient d'atteindre des records à 2'400 dollars l'once. Après une telle envolée, un retracement technique de forte amplitude est hautement probable même si plusieurs facteurs militent pour une nouvelle vague haussière :

  • Ajusté de l'inflation, l'or n'a pas encore atteint ses deux précédents records. Pour conserver son pouvoir d'achat de 2020, 2011 et 1979, il devrait s'échanger à respectivement 2'500, 2'654 et 3'420 en dollars de 2024 (cf. Fig. 4).
  • Contrairement aux banques centrales et aux professionnels de l'investissement, qui ont massivement accumulé de l'or au cours des derniers trimestres, les particuliers ne se sont pas encore lancés dans cette thématique. Depuis son sommet d'octobre 2020, le volume d'or détenu par les fonds indiciels (ETF) a chuté de 26%. Pour rattraper leur retard, il faudrait que les investisseurs privés achètent quelque 70 millions d'onces d'or supplémentaires, un accroissement de 85% par rapport au volume détenu actuellement (cf. Fig. 5).
  • A plus long terme, la baisse des taux, les tensions géopolitiques, la monétisation de la dette, le dérèglement climatique, ou toute incertitude générant du stress auprès des investisseurs favoriseront une appréciation structurelle de l'actif refuge ultime.

La décorrélation du cours de l'or et du taux de change du dollar interroge (cf. Graphique de la semaine). Qui des deux s'est apprécié à juste titre et, au contraire, qui devra chuter pour combler l'écart ?

  • Dans une première hypothèse, l'or reviendrait à 1'900 dollars l'once.
  • Dans l'alternative, le dollar s'échangerait à 1.20 pour 1 euro.
  • Dans une troisième et dernière option, l'écart pourrait ne jamais être comblé. Cela signifierait que la relation entre les deux "monnaies" s'est brisée, comme cela arrive régulièrement. Il est important de se souvenir que la tendance à long terme de l'or est haussière, tandis que celle du taux de change entre l'euro et le dollar est relativement stable.

Conclusion :


De manière pragmatique et pour des raisons fondamentales, les investisseurs chercheront à conserver une part d'or dans leurs portefeuilles. Leur allocation stratégique optimale nécessite un poids conséquent dans cet actif refuge. Au-delà de cette partie "coeur", dans leur allocation tactique, ils sécuriseront une partie des gains enregistrés grâce à l'or, voire vendront des dollars en anticipation de la dépréciation du billet vert.

RENDEMENT DES ACTIFS FINANCIERS

Recherche financière